Note ajoutée le 1er mai 2009 : de nouveaux documents m'amènent à reconsiédrer le contenu de cette note. Les lettres parlant des persécutions contre les juifs étaient écrites par Gertrud Brandt (l'homophonie du nom a pu jouer avec la mémoire de mon père). On se reportera donc ici pour en savoir plus. Ce qui n'interdit pas de conserver la mémoire de Maria Brandis.
Faute d’avoir plus d’éléments, je me suis contenté d’écrire que parmi les documents dont le tribunal a reproché la possession à mon père, il y avait « des lettres d’une juive, Madame Brandis, détenue à Theresienstadt ». Mon père lui-même n’était plus très certain de bien se souvenir du nom. Mais en triant ses courriers (ce qui explique que j’ai un peu délaissé ce blog), j’ai trouvé la copie d’une lettre qu’il a adressée, le 25 octobre 2000, au Cardinal Ratzinger, alors préfet de la congrégation pour la doctrine de la foi (et, depuis, élu pape sous le nom de Benoît XVI). Je note en passant que le cardinal lui a répondu quelques lignes polies mais sans intérêt.
Dans sa lettre, mon père développe l’importance qu’avait pour les pacifistes dont il était, le message de Noël 1942 du Pape Pie XII. Mais il ajoute aussi la liste des autres documents qui lui ont valu d’être condamné : deux sermons de l’évêque de Munster (von Galen), un poème de Reinhold Schneider et… une lettre d’une résidente de Theresienstadt, Madame Brandis. J’ai donc repris mes recherches sur Internet et découvert ici que Maria Brandis, née en 1865, dirigeait depuis 1911 dans à Bamberg une école privée. Dès l'automne 1935, elle n’eut plus le droit d’accueillir des élèves et elle n’a survécu que grâce à des dons de la communauté juive. En 1942, elle a été déportée à Theresienstadt où elle est morte le 23 janvier 1943, c'est-à-dire trois semaine avant que mon père se fasse arrêter. Sa mémoire est évoquée dans le livre de Freise-Wonka, Bamberger Frauengeschichten, (2006) et par une plaque apposée sur sa maison.
C’est en juin 1940 que la Gestapo a pris le contrôle de Theresienstadt (aujourd’hui Terezin, en république tchèque) et créé une prison. Le 24 novembre 1941, elle en a fait un ghetto muré qui devait servir de vitrine aux émissaires de la Croix-Rouge (tristement aveugles...) et rassurer sur le sort des Juifs déplacés. On y déporte des personnes âgées de plus de soixante-cinq ans, des artistes, des personnalités et des héros de la Grande guerre. En fait, on y meurt de faim, de maladie et de désespoir et c’est aussi un camp de transit vers les camps de la mort.
C'est probablement tout cela que Maria Brandis, la vieille institutrice de 78 ans, dénonçait dans sa lettre.
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