C’est, étrangement, dans une petite île que mon père aura passé la plus longue période de sa vie. Il n’a pratiquement vécu à Brême que pendant ses vingt premières années auxquelles on peut ajouter le temps mis à passer son bac après son temps de stage à Londres et Paris et quelques mois de vacances au cours des années suivantes. Rien ne peut compter dans ses années de théologie itinérante, son séjour berlinois brutalement interrompu en 1943, puis son circuit par diverses contrées d’Europe centrale en passant par les Ardennes. Paris le retiendra une douzaine d’années, la Lorraine une vingtaine. L’Île aux Moines, dans le golfe du Morbihan, l’a accueilli quasiment trente ans de sa vie.
Il me semble que mon père s’inscrit dans une très longue tradition, celle des originaux qui ont trouvé à l’Île aux Moines un lieu où vivre en toute liberté. Il faudra un jour faire l’histoire de ces originaux. Certains occupent une place toute particulière dans ma mémoire.
Monsieur et Madame « Porto », pour ne rappeler que le surnom de ce couple pathétique, fortement alcoolisé, allaient visiter quotidiennement la maison qu’ils se faisaient bâtir au centre de l’île mais dont ils ne virent jamais l’achèvement. Ils résidaient à l’hôtel de la Brise où leurs scènes de ménage étaient célèbres et où ils ont attiré l’attention d’un autre résident, l’écrivain Marcel Arland qui leur consacra un chapitre de son livre La Nuit et les sources (1963).
Francine Bensa (1893-1975) arriva vers 1935 à l’île avec son petit garçon. Cette artiste trouva une sorte de famille auprès des anciennes du village de Penhap et elle réalisa une magnifique série de bois gravés, de dessins et de tableaux évoquant les travaux quotidiens. Elle quitta l’île quelques années plus tard, vers 1943. Quand je l’ai retrouvée, dans le studio qu’elle occupait rue Chapon à Paris, elle m’offrit généreusement des originaux et les droits de reproduction de toutes ses œuvres pour mes livres sur l’Île aux Moines. Encouragée par moi, elle y revint et vers 1970, se baignant à Port Miquel et réalisant à nouveau des gravures.
Un jour, je compléterai la liste. Si je n’en fais pas un livre.
Quel plaisir de trouver des informations sur francine Bensa.
est-il possible d'entrer en contact?
Rédigé par : L.G. | 02 juillet 2008 à 08:49