Avec sa collection de bibles (plus de 500), de livres sur les lignes de la main, de guides sur les musées d’Europe et d’objets témoins des religions du monde, mon père a sans doute induit une partie de mon goût pour la collecte et la muséographie. C’est ainsi que j’ai été amené à concevoir un « Musée du loup » (au Cloître-Saint-Thégonnec dans le Finistère) et quelques expositions. C’est ainsi que j’ai rassemblé près d’un millier de photographies anciennes et de cartes postales concernant l’Île aux Moines (une petite partie a servi à illustrer L’Île aux Moines, au plaisir de la mer, texte de T. Sarmant), Keltia Grafic, 2006) et des dizaines d’objets, souvent sans grande valeur marchande mais pas sans capacité d’évoquer des personnes, des lieux, des activités. C’est ainsi que, il y a quelques années, j’ai été amené à la demande du Conseil général du Morbihan à préparer en lien avec un architecte une « Maison du paysage ». Faute d’un porteur motivé pour ce projet, tant au Conseil général qu’à la mairie de l’île, il n’a pas vu le jour alors qu’il aurait permis de rassembler beaucoup de bonnes volontés autour de la ferme de Kergonan où il devait être installé (je commence d'ailleurs à m'interroger sur le devenir de la collection rassemblée).
J’ai fait allusion à ce projet dans un précédent billet et à la demande générale je vais en reproduire ici les grandes lignes. Je partais de l’idée que la notion de paysage était au cœur de la réflexion des acteurs du patrimoine (ethnologues, historiens, écologues, aménageurs, architectes) et pouvait constituer le concept fédérateur dont l’équipement avait besoin. Ce fil conducteur permettait aussi d’éviter l’éparpillement et le bric à brac des « écomusées » sans programme scientifique et collections organisées. Je notais surtout que le paysage n’apparaissait que de façon très accessoire dans les musées et écomusées existant, ce qui permettrait à l’Île-aux-Moines de présenter un équipement original.
Les documents iconographiques anciens disponibles permettaient une véritable approche de l’histoire du paysage de l’Île-aux-Moines. De nombreux objets sans intérêt apparent pouvaient trouver leur sens en lien avec la notion de paysage. Même la compréhension du cromlech jouxtant la ferme pouvait prendre appui sur l’histoire du paysage. C’est ce que mettait en valeur un plan d’organisation générale autour de six thèmes principaux que je reproduis ci-dessous et où l’on verra que les ormes, frênes et autres chênes revenus en force dans l’actualité n’étaient pas oubliés.
Les thèmes pouvaient être abordés sous forme de panneaux très illustrés et peu bavards avec, autant que possible, l’association d’objets en trois dimensions et de documents iconographiques (ex. agrandissement d’une gravure de battage et présentation d’un fléau). Les objets fragiles ou précieux devant être présentés sous vitrine. Des jeux, des animations interactives complétaient chaque partie (ex. reproduction de coiffe ancienne à essayer).
En conclusion de l’exposition, on proposait une sorte de jeu du savoir-vivre à l’Île-aux-Moines qui intégrait les éléments importants de l’exposition (ex.: respect des murets). Des propositions concrètes pourraient trouver leur place près de l’accueil (ex.: « parrainez une fontaine en vous engageant à la nettoyer au moins une fois par an »).
Quatre bases informatiques (iconographie, cartographie, linguistique, généalogie) devaient être réalisées pour permettre des recherches croisées (ex.: quels documents sont répertoriés pour tel lieu et à quels toponymes correspondent-ils ?). La base de données concernant le vocabulaire et les expressions spécifiques à l’île devrait permettre d’entendre la prononciation tout en visualisant les termes et leur signification.
L’espace agricole
- Landes
- Champs, prairies, vignes
- Murets, entrées de champs (Conservatoire du littoral)
- Arbres : ormes, frênes, pommiers, chênes...
L’espace artisanal
- Carrières
- Moulins
- Forges
- Dentelles, broderies, coutures (costumes)
L’espace habité
- Maisons gallo-romaines
- Fermes
- Maisons de matelots
- Maisons de capitaines
- Manoirs
- Villas et hôtels (tourisme)
L’espace maritime
- Port
- Cales et échouages
- Grèves et plages, algues
- Vasières et herbiers
- Ostréiculture
- Passeurs
- Pêches et pêcheries (goret)
- Voiliers, plates et navires
- Ateliers de sel préhistoriques
- Les Îlois autour du monde
L’espace collectif
- Chemins, places
- Mairies (histoire communale)
- Commerces
- Douanes
- Écoles
- Sources, fontaines, puits, lavoirs
L’espace sacré
- Cimetière (intersignes)
- Croix
- Église, chapelles (histoire paroissiale)
- Mégalithes (Direction des affaires culturelles)
Sur écran d’ordinateur
- Base iconographique : photos, cartes postales, dessins, gravures, tableaux
- Base cartographique : parcellaire, relief, cultures, monuments, etc.
- Base linguistique : noms et surnoms, toponymes, vocabulaire, généalogies
Sur écran mural
- Montage sonorisé de diapositives
Sur maquette
- Le « golfe » à l’époque du cromlech
L’exposition enfants
Chaque partie importante du musée devait faire l’objet d’une mise en forme destinée aux enfants et placée à leur niveau. Cette mini-exposition devait fonctionner comme une sorte de jeu de piste avec un petit questionnaire final donnant droit à un « passeport pour l’Île-aux-Moines ».
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