J’ai déjà amplement évoqué ici le travail intérieur qu’impose le fait d’avoir à d'avoir à vider la maison de ses parents . Il me faut ajouter une annexe. La maison paternelle est aussi celle que l’on a occupée dans son enfance, sa jeunesse. Au-delà des souvenirs de la génération précédente, voire de plusieurs générations, elle contient vos propres souvenirs. Vous n’y pensiez pas, ne vouliez pas y penser, mais ils vous attendaient, là, tapis dans une malle, une boîte à chaussures, de vieux bocaux. Ici, pas de danger de détruire le Rosebud par inadvertance.
J’ai passé de nombreuses années, à partir de mes 14 ans, à parcourir l’Île aux Moines à la recherche de vestiges archéologiques. J’ai ainsi accumulé poteries gallo-romaines, tuiles de toitures pierres diverses. Si l’essentiel, confié à un ami pourra rester sur l’île où malheureusement tous les projets d’une muséographie digne de ce nom ont, pour l’heure, échoué.
Que garder de ces milliers d’heures passées dans les champs encore cultivés et sur les côtes pas encore murées ?
Ce sera un petit jeton d’ardoise trouvé dans un champ près du dolmen de Penhap. Le bateau qu’il représente a bien l’air d’un sinagot, mais pourquoi ne s’agirait-il pas de la représentation d’un de ces navires des Vénètes que Jules César a vaincus grâce à une providentielle (pour lui) chute du vent avantageant ses galères. Une enfance et ses rêves tenant sur un petit disque plat de 3,5 centimètres de diamètre. Qui dit mieux ?
Le plus probable est qu’il a été gravé par un petit pâtre gardant une vache et bien décidé, comme moi, à ne pas mourir d’ennui dans les landes de l’île. Le frère en Rimbaud de cet « enfant accroupi plein de tristesses » qui « lâche un bateau frêle comme un papillon de mai. »
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